Par Christelle Kamanan
Vous faîtes peut être partie de ces femmes auxquelles on a souvent dit ” tu es trop…”, “il faut que tu arrêtes d’être aussi exigeante” ou “n’en demande pas trop” ou même “apprends à te contenter de peu”.
Dans votre for intérieur, vous vous dîtes, mais je ne demande pas la lune. Je ne vais quand même pas faire semblant d’être une autre personne ; ça n’a pas de sens !
Ne sois pas trop…
Ces reproches sont courants. Une femme jeune, célibataire, affichant de l’ambition, de la détermination ou des désirs précis est perçue comme anormale. Encore plus quand elle cumule les trois! Dans les diasporas Africaines comme sur le continent on entend souvent” ne fais comme tes amies, tu n’es pas une Blanche”. Sous-entendu, elles peuvent exprimer, demander et même revendiquer leurs désirs sentimentaux. Même si cela paraît généraliste, elles sont plus généralement invitées à se construire en tant que personne, à explorer, à profiter de leur “liberté”. Avez-vous été encouragées par votre entourage à être en couple avec une personne n’altérant pas votre épanouissement, participant à votre bien être ? Ou avez-vous juste été incitée, pressée à “trouver un homme” pour “votre bien”?
En y pensant, je ne me souviens pas avoir reçu de soutien massif dans ma quête d’épanouissement.
Faisant plutôt partie de celle qui s’investissaient pleinement dans leurs études, leurs centres d’intérêts, leur carrière, j’ai vite été classée dans la case de celles à qui on dit ” arrête d’être aussi exigeante “. J’avais juste d’autres priorités, d’autres envies, celle de voyager, d’explorer le monde notamment. Et l’idée d’être en couple, juste pour être “normale”, en devant renoncer à mes désirs brûlants du moment ne me convenait pas du tout. Cela saupoudré de leadership, de détermination et d’une parole libérée. Avec une telle recette, il paraît que c’est difficile de “trouver un homme” pour une jeune femme!
25 ans. Les moralisateurs (en fait souvent, ce sont des moralisatrices) ne se cachent plus. Armés de leur bonne foi, ils posent des questions, donnent des conseils, veulent te présenter de “bons hommes”.
30 ans. On me plaint et me réconforte, sans même que je n’ai le temps de dire quoi que ce soit. “Oh ne t’inquiète pas, ça va aller!” D’autres questionnent ta sexualité “Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ?”. Pour rappel, ne pas être dans une relation de couple, ne signifie pas ne pas avoir de vie sexuelle. Oups, mauvaise fille; ça ne se dit pas! D’autres, évidemment interroge l’orientation sexuelle. “Parce que vous en Europe, hein, on vous connait.” “tu peux nous le dire tu sais, on ne va pas se fâcher.”
Certains pointeront du doigt la tradition en commençant leur phrase par “en Afrique …”.
S’agit-il vraiment de tradition ou d’un ordre établi suivant les recommandations coloniales, imposant une forme de domination envers les femmes. N’oublions pas que dans plusieurs cultures africaines précoloniales ou même actuelles, le matriarcat a été/est la norme.
Et aux quatre coins du continent, on dénombre des femmes qui se sont illustrées pas leur autorité et leur leadership. Bien qu’elles soient admirées et citées, on ne nous encourage pas forcément à exercer aussi notre leadership, en matière de sentiment.
40 ans. A voir…
Trouver un homme
Maintenant, parlons du fait de “trouver un homme”. S’agit-il d’une recherche, d’une quête, comme on cherche des œufs au chocolat, dans le jardin, à Pâques? Pourquoi faudrait-il chercher ou même trouver un homme?
Cela incite à croire qu’être en relation avec un homme, dépend uniquement de nous, les femmes. Il nous faut chercher et trouver. En même temps, il ne faudrait pas “trop en demander”. La logique ne veut-elle pas que celui, en l’occurrence celle, qui cherche, le fait en fonction de ce qu’il/elle souhaite obtenir? Parallèlement, nous ne sommes pas censées faire le premier pas, mais jouer à un jeu de cache-cache. Je me souviens une soirée kizomba, pendant laquelle certaines personnes étaient chamboulées de me voir chercher un partenaire de danse! Ces contradictions, mènent femmes et hommes à des incompréhensions. Plusieurs d’entre nous ne savent pas quoi faire et quelques hommes, pensent qu’ils ont uniquement besoin de payer le dîner au restaurant. Les femmes étant dans “le besoin d’être avec un homme, elles s’accommoderont de ce qu’ils peuvent faire ou ne pas faire.”
Derrière cela, se cache la logique moralisatrice et patriarcale selon laquelle le destin d’une femme se réaliserait dans, et à travers la vie de couple, avec un homme, bien sûr. Une femme ne deviendrait femme que lorsqu’elle serait mariée et mère. Avant on est juste une fille ou au mieux une jeune femme c’est-à-dire, mi-enfant, mi-adulte; une personne à laquelle on peut dicter une conduite. Et arriver à un certain âge, souvent la trentaine, on est une vieille fille! Ce concept m’a toujours beaucoup fait rire, tellement je trouve l’expression ridicule. Il y a quelques semaines, j’écoutais une émission sur “le mariage en Chine”, sur une radio à diffusion internationale. La pression y est tellement importante que certaines, “louent” des hommes pour qu’ils jouent le rôle de leur fiancé. D’autres, se rendent chez leurs parents que durant la nuit, afin de limiter les remarques et ragots des voisins. Enfin, de nombreuses jeunes femmes, qui souhaitent privilégier leurs études et leur carrière, affirment et revendiquent le terme de sheng nu, “périmée”.
On fait reposer sur les femmes la responsabilité d’être en couple. Pourtant, les psychologues et autres coachs en relation ne cessent de le souligner: une relation de couple est saine lorsque les deux personnes sont volontaires et participent activement à sa construction et son déroulement. Il n’y a donc ni quête ni recherche à mener; et encore moins une unique “responsabilité” féminine.
Il me semble être la chose la plus importante à souligner, à expliquer et à dire à voix haute aux jeunes filles et même aux préadolescentes.
Vous n’avez pas besoin de créer un “business plan “, si vous souhaitez être dans une relation sentimentale avec un homme. Il n’est pas nécessaire d’essayer d’être une autre personne, de changer ses goûts, ses centres d’intérêts ou même ses idées. Votre futur partenaire, même si il ou elle ne partage pas vos idées ou centres d’intérêts, aura au moins l’envie de les connaître et se réjouira du fait que vous ayez une pensée, unique, une personnalité singulière et des activités qui vous rendent heureuse.
Cela vous évitera bien des ennuis. Notamment, celui de se retrouver enfermée, coincée dans une union, qu’on regrette, finalement. Imaginez, qu’aujourd’hui soit votre dernier jour à vivre.
Que regretteriez-vous le plus?
Toutes les années pendant lesquelles vous n’avez pas été en couple ou toutes les fois où vous avez renoncé à vos aspirations pour être en couple?