By Iris Ntore

Chère sœur,

Tu as laissé ta terre et quitté les tiens pour venir vivre un rêve, le rêve de toute une famille et toute une génération. Tu as traversé l’océan pour rejoindre « la terre promise » : l’Occident. La terre où tout rêve est réalisable, où tout succès est possible.

Tu es arrivée et tu as réalisé que ce n’était pas gagné d’avance. Ce rêve que tu avais toujours eu et que ta famille te chantait est devenu un cauchemar.

Tu peines à trouver du travail valorisant. Tu as épuisé tes économies à imprimer des CV et à prendre le bus pour les déposer mais tu reçois toujours les mêmes réponses : « Désolé mais vous n’avez pas assez d’expérience », « Nous n’engageons pas en ce moment », « Nous ne pouvons vous prendre parce que vous n’êtes pas véhiculée», « Votre formation ne correspond pas à nos critères ».  Mais au fond de toi tu sais qu’ils ne te veulent pas à cause de tes origines.  Ce qu’ils ne te disent pas, c’est qu’ils n’embauchent pas de noirs. Pourtant, avant d’arriver en Occident, tu n’étais même pas consciente de la couleur de ta peau. Tu n’en peux plus, je le sais. Tu veux juste pouvoir vivre décemment. Tu aimerais pouvoir envoyer un petit rien à ta famille qui est restée dans ton pays. Mais au lieu de ça, c’est eux qui te dépannent à la fin du mois quand tu n’arrives plus à joindre les deux bouts.

Ma sœur, je sais aussi que c’est difficile de te faire traiter de tous les noms alors que tu as un nom. Le nom que tes parents t’ont donné à ta naissance. Ton nom est tout le temps écorché, comme si c’était un amusement pour eux, mais tu as fini par t’habituer. A quoi bon te défendre?

Pour moi, c’est difficile d’être loin des miens. Quand tu as des enfants, tu sais, ce n’est pas facile quand tu n’as pas ta famille pour t’aider. Je pense souvent à ma famille, au climat qu’il fait là-bas. Bref, je pense souvent à ce que ma vie aurait pu être si j’étais restée là-bas. Mais je suis reconnaissante pour cette opportunité.

Pour ne pas oublier la raison pour laquelle je t’écris cette lettre (car ma vie pourrait s’écrire en plusieurs chapitres), je veux t’encourager et célébrer tous les efforts que tu as pu faire. Quand personne ne disait ton nom correctement ou que personne ne se souciait de toi, tu as tenu bon. Tu t’es souvent sentie oublier, laisser pour compte mais laisse moi te dire que Dieu Lui ne t’oublie pas! Tu es la pupille de Ses yeux, Il te gardera toujours dans sa main.

Tes épreuves ne sont pas faciles mais regarde la personne que tu es devenue. Oui, c’est vrai tu n’es pas devenue Chimamanda Ngozi Adichie ou Lupita Nyong’o, mais tu es devenue cette personne merveilleuse que tu es maintenant. Tu n’es pas une copie. Tu es originale, forte, patiente et persévérante. Tu as acquis des qualités qu’aucun être humain ni l’argent ne pourraient t’offrir.

J’aimerais t’encourager et te dire que tu n’es pas seule. On te regarde comme une moindre que rien, on t’ignore, on te fait faire des tâches ingrates mais sache que tu as de la valeur! Tu n’es pas oubliée. Tu es la fille de tes parents et tu le seras toujours. Leur investissement en toi ne sera jamais perdu.

Essaie quelque chose aujourd’hui : Mets-toi devant un miroir et dis-toi à haute voix : « Je suis quelqu’un, je suis importante, j’ai de la valeur, je ne suis pas oubliée! ». Valorise-toi toujours, intentionnellement, car personne d’autres ne peut mieux le faire que toi.

Je termine par une citation de Michelle Obama : « le succès ne se mesure pas à la quantité d’argent que tu gagnes mais à l’impact que tu as sur la vie des gens ».

P.S : Tu es aimée et admirée! Ne lâche pas!

De la part de ta sœur africaine.